Pour la première fois en France, la plate-forme de location de meublée de courte durée AirBnb Irlande est condamnée pour la sous-location d’un logement sans l’accord du propriétaire et pour le dépassement de la durée légale de 120 jours.
Pour le président du GNI, c’est une première décision judiciaire historique en faveur de l’équité et la transparence et c’est une décision qui fait jurisprudence : « Pour les professionnels hôteliers, il s’agit d’une décision importante car c’est la première fois que la justice reconnaît la responsabilité civile d’Airbnb lorsque le site héberge des annonces illégales. Cela démontre que Airbnb fait de la concurrence déloyale à la profession en laissant ses logements loués plus de 120 jours par an », a notamment souligné Didier Chenet. Le propriétaire n’était pas au courant de la sous-location Dans le détail, en 2016, un propriétaire découvre sur le site d’AirBnb, les photos de son appartement parisien de 30 m² loué à la nuitée. Il contacte aussitôt le locataire qui reconnait avoir sous-loué l’appartement à des touristes de passage dans la capitale via le site de mise en location Airbnb France. Le propriétaire lui ordonne de retirer son annonce mais le locataire refuse. Se tournant vers la plateforme de mise en location de logement, le propriétaire demande à AirBnb France de supprimer l’annonce mais se dernier ne réagit pas. Après plusieurs mois d’échanges de courriers et la mise en demeure du locataire, le propriétaire assigne AirBnb Ireland, la maison mère d’AirBnb France, en justice pour manquement à ses obligations issues de la loi République numérique. AirBnb devra verser plus de 8.000 euros au propriétaire du logement Pour éviter les poursuites, le locataire s’accorde avec son propriétaire : il quitte le logement et lui transmet le relevé de ses locations émis par AirBnb France. A la lecture des documents, le propriétaire s’aperçoit que son locataire a perçu plus de « 49 301 euros pour 119 sous-locations illicites entre le 31 mars 2016 et le 24 septembre 2017 ». S’il ne peut plus réclamer les sommes perçues, le propriétaire demande à AirBnb, le remboursement des « frais de services », soit un peu plus de 1.800 euros, et des dommages et intérêts.
Dans sa décision rendue le 6 février, le tribunal d’instance de Paris du 6ème arrondissement a condamné Airbnb Irland à payer au propriétaire la somme de 3.000 € en réparation de son préjudice moral, 1.664 € en réparation de son préjudice matériel et 1.869 € en remboursement des fruits perçus de façon illicite. Dans cette affaire, le juge détermine en premier lieu qu’Airbnb a « incontestablement manqué à ses obligations légales » évoquant « une certaine mauvaise foi et peut-être (une) connivence » avec le locataire et en second lieu, il estime que le site d’hébergement a engagé sa responsabilité civile en ne respectant pas deux obligations prévues par la loi République numérique « l’information du loueur (avec déclaration sur l’honneur qu’il sous-loue avec l’accord du propriétaire) et une durée maximum de location (pas plus de 120 jours par an) ».
La plateforme a réagi à ce jugement en indiquant à l’AFP : « Il s’agit d’un litige désormais résolu entre un propriétaire et son locataire. Airbnb n’ayant aucune part dans ce conflit d’ordre privé, nous envisageons de faire appel de cette décision ».
Cependant, pour le conseil du propriétaire, Me Jonathan Bellaiche, qui a déjà fait condamner pénalement les plateformes UberPop et Heetch, la plate forme AirBnb n’a nullement respecté les textes en vigueur: « Non seulement AirBnb n’a pas vérifié que le locataire était en droit de louer mais il a en outre permis de louer le logement plus de 120 jours en ne supprimant pas l’annonce comme le lui réclamait le propriétaire ». Il indique en outre : « En reconnaissant la responsabilité civile du site de location, le tribunal permet désormais à tout propriétaire dont le bien a été sous-loué illégalement de réclamer, dans le délai légal de 5 ans, les frais de services et donc aussi les loyers indûment perçus… Du jamais vu ! ».P.G.
16 février 2018